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Isolé

Jour 1.

Où lorsque l'infiniment petit vient terrasser un colosse aux pieds d'argile.

Honnêtement, ce serait mentir de dire que l'on ne s'y attendait pas. Cela fait plusieurs semaines qu'il n'y a que ça dans l'air. Au début, on plaisante, on se dit que ce n'est pas sérieux, ça ne peut pas l'être. Nous, société pseudo civilisée avec sa technologie si avancée, comment pourrait-on être mis en danger par une flopée de microbes ?

Toujours le cul entre deux chaises, incapable de prendre des décisions. Si tu as le pied qui brûle, est-ce que tu attends d'avoir les oreilles qui chauffent pour éteindre le brasier ? Non ? Toute cette merde restera un mystère pour moi. Est-ce que l'on nous a pris pour des cons ? On le méritait certainement.

Janvier, tout part en couilles. Tu le connais ce parfum de début d'année qui te fait dire que l'on n'est pas entrain de savourer un grand cru. On boit le calice jusqu'à la lie et on dégueule ? Ça serait si simple. Non, son odeur reste collée à nos peaux de potentiels contaminés et son goût faisandé imprègne nos lèvres. Tout est devenu toxique, même la parole. Finalement, plus les choses changent, plus elles restent les mêmes. Je l'ai déjà tellement dit.

Au début de l'épidémie, il ne fallait pas savoir faire des claquettes en bottes en caoutchouc pour comprendre que ça daubait la mort. J'ai vu le bateau couler, le capitaine n'est pas resté à bord. On nous abandonne en nous cachant. Priez pauvres pêcheurs pour ne pas rejoindre le clan des infectés. Celui de celles et ceux que l'on a balancé au compte-gouttes avant que la vague ne nous submerge.

Vous avez une télévision, un téléphone, internet, vous savez déjà tout ça. Ça parait loin, pourtant au fond de la gorge ça gratouille, le nez qui coule et ça panique. Qui a envie de crever ? La mort ne sera jamais glamour. Et si l'on était des bombes prêtes à exploser auprès des autres ? On s'enferme, on se ment.

Je n'ai pas peur pour moi, je n'ai rien à perdre, mais si je propage le mal ? L'enfer ce n'est plus les autres, c'est nous.

La veille, j'ai fait le plein de ma voiture, je sais que l'on ne pourra plus voyager jusqu'à nouvel ordre mais je veux qu'elle soit prête. Pour moi ou pour un autre. J'ai roulé pendant vingt minutes en pleine nuit, puis je me suis dit que les rues, avec ou sans quarantaine, étaient vides. Ici, il n'y aura pas de bouleversements. Finalement, ce confinement ne modifiera pas mon existence. Encore une pensée égoïste. Mais qu'est-ce que vous voulez faire ? Cette guerre de l'invisible renie ses soldats et ses résistants, je n'y ai pas une grand utilité. Qu'est-ce que je peux faire ?

*

Je n'ai plus envie de réfléchir sur ce qui a merdé dans ma vie, pourquoi si je pars je ne laisserai rien. Il n'y a plus de jour, plus de nuit, juste un brouillard permanent. Tu ne me vois plus, ne me comprends plus, il paraît que c'est ainsi que l'on disparait. Pourtant il faudra survivre, on était déjà si loin, pourquoi ajouter cette distance infâme ? À quoi je m'attache ? Pourquoi ?

*

Prenez soin de vous, sans paniquer, tout ira bien.

 

Disappear Here

https://youtu.be/rsNSkjuX55w

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