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Jour 7

À partir de quand on oublie que l'on a été ?

C'est le printemps, ce virus dévore les saisons, jusqu'au jour de Litha*? Est-ce que le soleil viendra nous sauver ?

Je fais partie de ces millions "d'abrutis" qui écrivent un journal lors de ce confinement. Visiblement ça pose un problème à une certaine élite de la culture, à ces stylistes de la sociologie, à ces hyènes qui espèrent que la pièce tombera de leur côté, à ces influenceurs qui risquent de perdre leurs sectes. À celles et ceux qui n'ont pas eu peur d'attraper une crève qui ne voulait que la peau des vieux. À ces futurs sauveurs de l'humanité.

À tous ces connards qui ont kidnappé la bienpensance, vous voyez à quoi ça ressemble une civilisation qui se casse la gueule ? On n'est pas arrivés au terminus. Attachez vos ceintures. On ne contrôle plus rien.

20 morts dans une maison de retraite à quelques kilomètres d'ici. Voilà la réalité du jour. Tu sais ce que ça fait de suffoquer ? Cette immondice puante rôde et, lorsqu'elle se sera repu de ces carcasses, elle se tournera tôt ou tard vers toi, vers moi. J'en fait trop ?

Tout a commencé en janvier, premier festival, dernier festival. Il y avait dans l'air cette rumeur, on n'observait pas encore les autres avec un regard inquisiteur. Les journalistes, les ministres, les présidents, ils avaient un bouclier magique qui nous couvrirait. Leurs mots étaient fantastiques, fantasmagoriques. Quand les voisins sont tombés, nous ne risquions rien. Cette frontière qui avait stoppé la radioactivité allait une nouvelle fois nous préserver.

Ça s'est passé tellement rapidement. Je sentais qu'on allait dans le mur, je ne suis pas médium, ni devin. Il y a un an j'écrivais un texte qui parlait d'une bactérie qui nous niquait la gueule, d'un virus que la terre dégueulait pour nous anéantir. Je ne fais pas de promo, c'est juste pour vous dire que c'était prévisible. Ils ont annulé Livre Paris, ça n'a pas provoqué tant d'émotions dans la population. Le soir, amer, je buvais une Corona. Je sentais la fissure s'agrandir. Je voyais mon mois de mars se barré. Plus de festival, de tatouage, de Paris, de...

Tant d'insouciance, tant d'incompétence. Quand un abruti comme moi pense qu'il aurait mieux gérer la crise alors c'est que l'on est presque au fond de la piscine, à boire la tasse, tchin-tchin.

Il me fallait ce dernier contrat, besoin de thunes, de faire face. À 500 mètres de mon lieu de tournage, les tentes d'accueil d'urgence poussaient devant l'hôpital. On limitait le nombre de personnes en espaces clos. De la magie. De la sorcellerie. C'était il y a deux semaines.

Je décidais de me confiner avant l'heure. Pourquoi n'ont-ils pas pris la même décision ?

Pas assez de tests, non monsieur, vous avez des symptômes préoccupants mais je n'ai plus le choix. Mon père, 72 ans, renvoyé ici, sans certitudes. C'était il y a une semaine. On s'en sort. Seuls.

Pas assez de masques pour celles et ceux qui luttent contre le démon couronné.

Les ministres, présidents, présidentes, sportives, sportifs, actrices, acteurs, ont été testé.e.s. Mais nous ? On doit attendre de savoir ce qu'il y a dans le paquet cadeau ? Surprise !

L'Est a été abandonné, mon Est a été abandonné. Voilà pourquoi j'écris et que je continuerai à le faire. Pour ne pas oublier que l'on a été.

 

Keep Faith
https://youtu.be/oWffg90Es9E

 

 

*Solstice d'été.

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