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Errance - Page 17

  • Jour 8

    Plus toxique qu'un tour de montagnes russes.

    Errances statiques et psychoses à gogo. 

    Voilà, c'est l'ouverture de la fête foraine. On est condamnés à rester à regarder des attractions immobiles.

    Je ne supporte pas d'être enfermé, je sais que ça a peu d'importance, qu'il y a pire et qu'il y a mieux, qu'il ne faut pas se plaindre. J'ai un jardin, je peux en faire le tour mais il parait que même dehors ça craint.

    Les chiens finiront par se bouffer entre eux, tu sens la tension qui monte dans ces roulottes posées sur des cales ? La lassitude serpente et lézarde les murs de nos raisons. Trop de dangers je vous dis ma brave dame.

    Je viens de passer la journée à écrire, je fais un peu de rab ici mais je me sens comme un unijambiste à un concours de coups de pied au cul (citation tirée du film "Le Blob"). Je raccroche les gants. Sans élégance.

     

    Venomous

    https://youtu.be/UgB18IninUk

  • Jour 7

    À partir de quand on oublie que l'on a été ?

    C'est le printemps, ce virus dévore les saisons, jusqu'au jour de Litha*? Est-ce que le soleil viendra nous sauver ?

    Je fais partie de ces millions "d'abrutis" qui écrivent un journal lors de ce confinement. Visiblement ça pose un problème à une certaine élite de la culture, à ces stylistes de la sociologie, à ces hyènes qui espèrent que la pièce tombera de leur côté, à ces influenceurs qui risquent de perdre leurs sectes. À celles et ceux qui n'ont pas eu peur d'attraper une crève qui ne voulait que la peau des vieux. À ces futurs sauveurs de l'humanité.

    À tous ces connards qui ont kidnappé la bienpensance, vous voyez à quoi ça ressemble une civilisation qui se casse la gueule ? On n'est pas arrivés au terminus. Attachez vos ceintures. On ne contrôle plus rien.

    20 morts dans une maison de retraite à quelques kilomètres d'ici. Voilà la réalité du jour. Tu sais ce que ça fait de suffoquer ? Cette immondice puante rôde et, lorsqu'elle se sera repu de ces carcasses, elle se tournera tôt ou tard vers toi, vers moi. J'en fait trop ?

    Tout a commencé en janvier, premier festival, dernier festival. Il y avait dans l'air cette rumeur, on n'observait pas encore les autres avec un regard inquisiteur. Les journalistes, les ministres, les présidents, ils avaient un bouclier magique qui nous couvrirait. Leurs mots étaient fantastiques, fantasmagoriques. Quand les voisins sont tombés, nous ne risquions rien. Cette frontière qui avait stoppé la radioactivité allait une nouvelle fois nous préserver.

    Ça s'est passé tellement rapidement. Je sentais qu'on allait dans le mur, je ne suis pas médium, ni devin. Il y a un an j'écrivais un texte qui parlait d'une bactérie qui nous niquait la gueule, d'un virus que la terre dégueulait pour nous anéantir. Je ne fais pas de promo, c'est juste pour vous dire que c'était prévisible. Ils ont annulé Livre Paris, ça n'a pas provoqué tant d'émotions dans la population. Le soir, amer, je buvais une Corona. Je sentais la fissure s'agrandir. Je voyais mon mois de mars se barré. Plus de festival, de tatouage, de Paris, de...

    Tant d'insouciance, tant d'incompétence. Quand un abruti comme moi pense qu'il aurait mieux gérer la crise alors c'est que l'on est presque au fond de la piscine, à boire la tasse, tchin-tchin.

    Il me fallait ce dernier contrat, besoin de thunes, de faire face. À 500 mètres de mon lieu de tournage, les tentes d'accueil d'urgence poussaient devant l'hôpital. On limitait le nombre de personnes en espaces clos. De la magie. De la sorcellerie. C'était il y a deux semaines.

    Je décidais de me confiner avant l'heure. Pourquoi n'ont-ils pas pris la même décision ?

    Pas assez de tests, non monsieur, vous avez des symptômes préoccupants mais je n'ai plus le choix. Mon père, 72 ans, renvoyé ici, sans certitudes. C'était il y a une semaine. On s'en sort. Seuls.

    Pas assez de masques pour celles et ceux qui luttent contre le démon couronné.

    Les ministres, présidents, présidentes, sportives, sportifs, actrices, acteurs, ont été testé.e.s. Mais nous ? On doit attendre de savoir ce qu'il y a dans le paquet cadeau ? Surprise !

    L'Est a été abandonné, mon Est a été abandonné. Voilà pourquoi j'écris et que je continuerai à le faire. Pour ne pas oublier que l'on a été.

     

    Keep Faith
    https://youtu.be/oWffg90Es9E

     

     

    *Solstice d'été.

  • Jour 6

    Comme un poisson rouge dans son bocal.

    Comme si tout ce qui avait de l'importance hier devait encore nous impacter. Je mets mon réveil pour un concours en ligne, je tiens à me première place et en même temps j'en n'ai rien à foutre. Je me trompe d'heure. J'arrive après "la guerre". C'est drôle. Les gens s'embrouillent pour trois cacahuètes alors que le singe qui est au-dessus de nos têtes ne bouge pas, il reste dans son arbre, il voit l'eau monter, nous regarde nous noyer en se disant que l'évolution est une blague.

    Je ne vais pas verser dans la morale, je lui préfère la fable et ses métaphores. Dans ta nouvelle cellule tu penses au poisson rouge dans son bocal ? Hawking te dirait que tu vois le monde de manière déformée, comme la bestiole que tu tiens enfermée, elle perçoit notre univers au travers du verre, ou du plexiglas, de sa prison. Oui, je tiens à ce mot, prison. La réalité nous échappe, qu'on le veuille ou non. Notre problème est gigantesque, nous n'analysons les choses qu'avec des certitudes antédiluviennes. Ok, je pars loin. Mais tu vois où je veux en venir, nous ne sommes rien. Nous subissons avec arrogance, on continue à s'imaginer en haut de la montagne. Nous ne comprenons rien au filtre que l'on a sous les yeux. Redescendons de plusieurs étages pour nous dire que l'on a merdé dans toutes les largeurs, et les longueurs aussi. Nous sommes de biens piètres architectes.

    C'est hyper angoissant de ne percevoir des  l'extérieur qu'avec un téléviseur et les réseaux "sociaux", on se sera donné bonne conscience en passant quelques coups de téléphone, en ayant des pensées vagabondes pour des personnes qui à un moment ont traversé nos vies. Est-ce qu'elles vont bien ? Tu t'endors en te posant deux trois questions. Dans le meilleur des cas tu oublies, la gueule posée contre l'oreiller pendant que tu baises (ou que tu te fais baiser), dans le pire des cas ça te hante, ça te démange, tu veux prendre ta bagnole, sauver des vies, aimer avant de jouir. C'est interdit. Alors tu te fais mille promesses pour "quand ça redeviendra comme avant". Puis tu oublies comment le poisson rouge te regarde depuis son bocal.

    Lève les yeux et cherche les limites. Il n'y en a pas. N'en impose jamais aux autres.

     

    Limits

    https://youtu.be/HSpaZjR_ULE